Bertrand Méheust fait figure d’exception dans la famille des intellectuels français.
Ancien professeur de philosophie, sociologue, membre du comité directeur de l’Institut Métapsychique International (IMI), l’homme, libre et indépendant, aime marcher sur les bords du réel, à la lisière du possible.
Depuis une trentaine d’années, il réfléchit sur tout ce qui a trait à la parapsychologie et aux problèmes connexes. Mais il s’est surtout fait connaître par un essai écologique publié, il y a deux ans, La politique de l’Oxymore.Son moteur : se frotter aux pratiques métapsychiques en remontant les couloirs du temps, avec son regard pénétrant d’historien et d’épistémologue.
Peu sensible à l’ostracisme ou à l’ironie qu’il rencontre ici et là, et même plutôt, semble-t-il, amusé par ces réactions, ce chercheur, considéré comme l’un des meilleurs experts en la matière, poursuit sa route avec humilité et précise sa réflexion, en toute sérénité.
Vous êtes un intellectuel reconnu, spécialiste de la parapsychologie depuis une vingtaine d’années. Comment a évolué votre intérêt pour la question du paranormal ?
Bertrand Méheust : Si on prend en compte ma période ufologique, cela fait plus d’une trentaine d’années que je laboure ces sujets. Je n’ai pas honte de le dire, j’ai commencé par m’intéresser aux ovnis, qui ont été mon école, et d’ailleurs j’ai toujours un œil sur cette question.
Puis, au début des années quatre-vingt, j’ai entrepris une thèse sur le mesmérisme, ce qui m’a conduit à la parapsychologie stricto sensu. Au plan professionnel, j’étais professeur de philosophie dans le secondaire. Je suis maintenant retraité, et depuis cette année, je donne des cours à l’université de Lausanne.
Donc, je suis devenu un peu universitaire, mais après avoir pris ma retraite ! Ce détail est important : un universitaire ne peut pas s’intéresser ouvertement à la parapsychologie sans être ostracisé… J’entends par « ouvertement » : se pencher aussi sur la réalité des faits.Pour des raisons personnelles, je m’intéresse donc à tout ce qui peut remettre en cause notre conception du réel, aux faits qui ont une portée épistémologique particulière.
J’ai réalisé une thèse à l’université de Paris I, qui portait sur le mesmérisme, c’est-à-dire le magnétisme animal (un courant de pensée datant du XVIIIe siècle qui prétend que les êtres et les choses baignent dans un fluide commun). Elle a été publié en 1999, en deux tomes sous le titre Somnambulisme et Médiumnité. À l’origine, il s’agissait d’une thèse de philosophie que j’ai transformé, sur le tard, en thèse de sociologie.
Ce choix a été judicieux, car la question du mesmérisme a introduit un conflit dans la culture, entre des visions du monde totalement opposées, qui « s’entretuaient » sur la question du bornage des facultés humaines…Donc, mon travail a débouché sur l’étude des conflits épistémologiques. Je m’intéresse maintenant beaucoup aux conflits sociaux, mais à l’origine, je m’intéressais surtout aux conflits d’idées
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