Avant d'être un livre majeur de spiritualité, L'Explorateur de l'Au-delà est surtout un incroyable résumé d'informations qui ont même la particularité étonnante d'être parfois en avance sur leur temps.
La puissance de cette oeuvre littéraire étonne autant par son début que par son développement, inattendu, richissime et laissant perplexe, tant les scènes décrites dépassent l'entendement mais confirment au passage certains points que la littérature des « expériences aux frontières de la mort» lancée par le Dr Raymond Moody en 1974 nous a permis de découvrir.
Ici, nous avons Sir Farnèse, un sujet de Sa gracieuse Majesté, un médium comme les aimait Victor Hugo, saisi par une présence, un esprit nommé Franchezzo qui veut lui raconter sa vie. Du coup, au lieu d'une biographie classique qui commence à la naissance, l'histoire commence là où les biographies normales se terminent : dans un tombeau !
Ce génial artifice littéraire a laissé depuis des traces chez bien d'autres écrivains ( Robertson Davies dans son livre Murther & Walking Spirits en a fait un usage intense ) y compris français, comme par exemple Jacques Attali dans Le Premier jour après moi ou dans la Vie Interdite de Didier Van Cauwalaert, tous curieux de connaître la réaction de leur entourage à l'annonce de leur mort. On ne s'étonnera donc pas d'apprendre que L'Explorateur de l'Au-delà ait aussi donné naissance à trois films majeurs, Ghost, Sixième Sens, et surtout Au delà des rêves, qui examine en détails ce qui se passe de « l'autre-côté ».
Pourtant, l'Explorateur de l'Au-delà n'est pas une extension de la Divine Comédie de Dante mais bien une version surnaturelle du Bel Ami de Maupassant : le lecteur suit le héros, comme s'il s'agissait de lui-même, dans la progression de cette âme qui se réveille au bas de l'échelle spirituelle, à quelques centimètres de son cercueil. Cela peut aussi être l'histoire de chaque âme. Nous assistons, impuissants, au désespoir du personnage qui, malgré ses cris, n'arrive pas à se faire entendre de sa bien-aimée alors qu'elle vient fleurir son tombeau, exactement comme Patrick Zwayze parlant à l'oreille de Demi Moore dans le film Ghost. Nous suivons sa lente évolution en ces royaumes étranges où « les innombrables maisons du Père » se comptent manifestement par millions et dont certaines semblent être aussi dangereuses que les quartiers les plus mal famés de New York jusqu'aux batailles « cosmiques » entre Anges et Démons. Ici toutefois, et contrairement à Ghost, ce n'est plus l'argent, ni le pouvoir, qui animent ce héros maupassien mais bien la volonté d'aimer et de réparer ses fautes ( qui ne sont pas celles qu'on croit ). De l'autre-côté semble-t-il, seul le pardon permet manifestement d'avancer.
Ce livre a aussi un autre avantage ( ou inconvénient ) : en nous plaçant au seuil de notre propre mort, nous sommes forcés de nous dire : « admettons que je sois à la veille de mourir et qu'il existe une vie après la mort, que vais-je découvrir à mon tour, comment cela va-t-il se passer pour moi ? ». Et là, on découvre que la réponse n'est pas toujours très simple. Celui qui a exploré cette question avec une imagination totalement débridée reste l'écrivain américain Philip-José Farmer dans le premier tome de sa série Le bateau fabuleux où il met en scène tous les humains ayant vécu sur Terre se réveillant de la mort au même instant... Pour Franchezzo en revanche, le réveil est immédiat et pas aussi simple que la vision de Farmer : dans son « après-vie » il doit repartir à zéro. Et en même temps, il veut que son amie lui reste fidèle. Difficile à gérer, surtout de l'au-delà, même pour un richissime aristocrate mort. Mais l'amour recèle des forces insoupçonnées...
S'il existe quelques textes français de « A Wanderer in the Spirit Lands » ( le titre original anglais ) aucun éditeur à ce jour n'a réussi à rendre à cette oeuvre littéraire extraordinaire la place qu'elle mérite et cela pour une très raison simple : la traduction réclame trop de temps, bref trop de travail pour retrouver le rythme du livre original en anglais de 1894, et trop de concentration pour lui donner le ton « 2004».
Aussi, Anne-Marie Bruyant et moi-même, nous nous sommes attelés à cette tâche afin de lui donner une nouvelle dimension avec comme seul objectif, être fidèle au rythme et à la fluidité du tourbillon qui a saisi la main du britannique Farnese, mais sans les terribles tournures stylistiques, typiques de la littérature du XIXe siècle dont Orlando par exemple est l'un des meilleurs représentants.
En conclusion, L'Explorateur représente le livre le plus grandiose jamais écrit sur le parcours individuel dans l'Au-delà, car, tel un guide Michelin, il nous permettra de ne pas nous sentir totalement perdus et d'éviter ainsi toute crise d'anxiété lorsque nous ferons nos premiers pas de l'autre côté...
Pierre Jovanovic
http://www.lejardindeslivres.fr/explorateur.htm